Les Consolantes a été créée au Poème 2 à Bruxelles en Mai 2017 dans une mise-en-scène de François Emmanuel et Pascal Crochet, avec Isabelle Wery (Percie), Gwen Berrou (Nin) Leone François (Mo) et Fabienne Crommelynck (Madame)

NIN.

Je suis la femme lacustre. Dit.

Je suis la femme sans tête. Dit.

Je suis la femme de l’orage. Dit.

Je suis la femme qui traverse l’eau. Dit.

Je suis la dépeuplée.

(un temps)

Docteur ?

MO

Moi je dis : toutes les femmes.

Elles marchent avec leur secret, elles sont grandes, elles sont petites, elles marchent en compagnie.

Quand le sang vient de l’une, l’autre le lui prend, quand le sang coule de l’une, l’autre le lui boit.

Quand le geste terrible tombe elles viennent contre la muraille et on les entend parler jusqu’au fond de la nuit.

Il y en a aussi qui portent une petite dans le ventre et elles viennent accoucher tout doucement au pied de la muraille.

La nuit, dans une chambre d’asile, trois femmes, Mo, Nin et Percie, sont en présence d’une nouvelle venue. Cette compagne endormie, Madame, semble dépositaire d’un secret qui excite leur curiosité.

Du fait de leur longue réclusion, leur « malajustement » au monde, chacune de ces trois compagnes de chambre est habitée par une langue qui lui est propre. Langue joueuse chez Percie, langue boiteuse chez Mo, langue oraculaire chez Nin.

La pièce se déroule comme un cérémonial sorcier scandé plusieurs fois par le passage du veilleur qui force les femmes à se recoucher. C’est un théâtre de l’approche d’abord puis un jeu intrusif et fouineur dans les affaires de Madame avant que survienne par à-coups la révélation.

Viendra ensuite la tentative d’absorber, intégrer, conjurer.

Les mots miroitent et jouent de faux-semblants chez Percie, chez Nin ils incantent, ils chantent, chez Mo ils vont à l’assaut d’une vérité introuvable. Les corps reçoivent de plein fouet la révélation et vont tenter comme ils peuvent de l’exorciser.Les Consolantes est une pièce sur la sororité des réprouvées, des exclues, des folles, et plus largement sur le lien qui unit entre elles toutes les femmes, au-delà des bizarreries de langage, de comportement, et même grâce à cette note fêlée qui montre à nu leur humanité.